Les activités mécaniques d’engins roulants dans la ville de Korhogo est une alternative prégnante de la résolution du chômage des jeunes dans ladite ville. Quel est l’apport des activités mécaniques d’engins roulants dans la résolution du chômage urbain à Korhogo ? La présente recherche vise à analyser les activités mécaniques d’engins roulants et leur impact dans la réduction du chômage dans la ville de Korhogo. Pour ce faire, La méthodologie adoptée est axée essentiellement sur l’observation, les relevés des coordonnées GPS et l’analyse des données de terrain issues d’enquête par questionnaire. Cette démarche montre les différents types d’activités mécaniques d’engins roulants et leurs caractéristiques, le fonctionnement des ateliers de mécanique d’engins roulants. Ce travail présente également ce secteur comme un secteur d’activité pourvoyeur d’emploi. Ces résultats peuvent orienter la mise en œuvre d’éventuelles stratégies d’organisation et de structuration de ces activités dites informelles afin de juguler la question du chômage.
Mots-clés
The mechanical activities of rolling vehicles in the city of Korhogo is a significant alternative to the resolution of youth unemployment in that city. What is the contribution of the mechanical activities of rolling vehicles to the resolution of urban unemployment in the city of Korhogo ? This research aims at studying the effects of mechanical activities of rolling vehicles in order to assess the importance of these activities in the urban environment of the northern Ivorian capital. This is all the more necessary as the possible implementation of measures to mitigate or reduce the youth unemployment rate requires a thorough knowledge of the real situation. To this end, the methodology adopted focuses mainly on field observation by analysing field data from questionnaire surveys and secondary data from previous work. This approach showed the different types of mechanical activities of rolling vehicles and their characteristics, the functioning of rolling vehicles mechanics workshops. This work also presented this sector as a sector of activity that provides employment. These results can guide the implementation of possible strategies for organizing and structuring these so-called informal activities in order to tackle the issue of unemployment.
Introduction
Le marché du travail demeure un élément clé des économies africaines mal connu en l'absence, bien souvent, d'enquêtes statistiques nationales sur celui-ci. A Korhogo, chef-lieu de la région du Poro, carrefour et pôle de développement régional, le secteur informel est constitué par l'ensemble des activités économiques (artisanat, tourisme, commerce de rue, mécanique ...) échappant à toute forme d'enregistrement qu'il soit d'ordre fiscal, commercial et/ou statistique. Korhogo est une ville commerciale et touristique qui regorge bons nombres de services administratifs. C’est un modèle d’intégration sous régionale car elle enregistre de nombreux ressortissants de la sous-région (Maliens, Burkinabés, Ghanéens, Guinéens…). Ce fait lui a valu une rapide croissance spatiale et démographique ; par ricochet une augmentation du taux de chômage. La question est de savoir comment les activités mécaniques d’engins roulants dans la ville de Korhogo contribue-t-elle à la résolution du chômage dans ladite ville ? Ainsi, assistons-nous à la création fulgurante d’activités informelles telles que les activités mécaniques d’engins roulants.
1. Méthodologie de recherche
1.1. Cadre de l’étude
Le département de Korhogo couvre une superficie de 12 500 Km2, soit 3,9% du territoire national. Sa population est estimée à 536 851 habitants (268499 hommes et 268 352 femmes), soit une densité moyenne de 32,6 habitants/Km² (RGPH, 2014). La ville de Korhogo est limitée au nord par le 10° parallèle, au sud par le 5° parallèle, à l’est et à l’ouest par le 5° et 6° de longitude ouest (Beaudou et al, 1980). L’étendue de la commune s’observe sur une superficie de 700 Km2 » (RGPH, 2014). Le choix de Korhogo dans le cadre de cette étude n’est pas fortuit. L’extension spatiale de la ville est remarquable (figure 1). La population de la ville augmente très rapidement ainsi que le taux de chômage. Il est mis en exergue l’apport des activités mécaniques d’engins roulants dans la résolution du chômage dans la ville de Korhogo.
1.2. Collecte et traitement des données
La collecte des données a été faite en trois phases successives d'investigation. La première, porte sur un échantillon représentatif de 133 garages. Elle vise à inventorier les garages, les localiser à l’aide d’un GPS. Au cours de la seconde étape, les responsables des garages précédemment identifiées font l'objet d'une enquête, centrée notamment sur le profil sociodémographique des acteurs des garages à travers un questionnaire. Enfin, la dernière phase a pour objectif de montrer les différents emplois dans les garages. La méthode retenue a pour principal avantage d'identifier de façon fiable les garages mécaniques d’engins roulants. Cette méthode repose sur l'utilisation de l'imagerie satellitaire qui a servi, grâce à un repérage de la densité démographique des îlots urbains, à l'élaboration du plan de sondage initial.
2. Résultats et discussion
L’étude s’est focalisée sur les types d’activités mécaniques d’engins roulants et leurs caractéristiques, le fonctionnement des ateliers mécanique d’engins roulants
2.1. Les types d’activités mécaniques d’engins roulants et leurs caractéristiques
2.1.1. Les ateliers de mécanique de motos et d’automobiles
La ville de Korhogo abrite de nombreux ateliers de mécanique composés des garages d’entretien et de réparation de motos et d’automobiles. Les ateliers de motos sont composés des garages de grosses motos, de tricycles et de mobylettes. Les garages mixtes exercent l’entretien et la réparation sur toutes les marques de motos. En ce qui concerne les ateliers de mécanique automobile, l’on rencontre des garages de poids légers (voitures, camionnettes, minicars) et ceux de poids lourds (autocars, remorques et semi-remorque). Le tableau suivant présente la proportion des types d’ateliers mécaniques dans la ville de Korhogo.
Le tableau 1 présente la composition des ateliers mécaniques à Korhogo. En effet, les garages de motos constituent la part la plus importante et représentent 72,93 % du total, soit 97 garages. Au nombre de 36, les garages d’automobiles représentent 27,07 % du total. Ce faible taux s’explique par le fait que le parc automobile de la ville de Korhogo est moins fourni. L’implantation des garages d’automobiles nécessitant non seulement des espaces un peu plus grands, mais aussi d’énormes capitaux peut être une autre explication. Cette inégale répartition des ateliers de mécaniques sur l’espace de Korhogo se perçoit à travers la figure suivante.
La ville de Korhogo compte à ce jour 133 garages. « Les activités informelles sont concentrées généralement au centre-ville » (L. FOFANA, 2012). A Korhogo, les ateliers de mécaniques d’engins roulants sont importants dans les quartiers du centre-ville au détriment des zones périphériques (figure 2). Ces ateliers sont localisés dans les domaines publics et à proximité des habitations (photos 1 et 2).
Les activités mécaniques sont reparties inégalement sur l’espace urbain de Korhogo. Elles sont plus concentrées au centre-ville qu’à la périphérie. La figure N°2 présente la localisation des ateliers de mécaniques à Korhogo. Cette concentration peut s’expliquer par le fait que les quartiers Banaforo, Soba, Dem, Koko, Delafosse et Sonzoriboufou soient des quartiers populaires mais également des quartiers d’affaires (commerces, administration).
2.1.2. Le mode d’acquisition du site
Plus de la moitié (56%) des mécaniciens installés à travers la ville de Korhogo occupent le domaine public. Ils payent des taxes mensuels (3000 FCFA) ou journaliers (100 FCFA) à la Mairie. D’autres (30%) sont installés sur des lots non bâti ou mi-bâti en habitation. Les chefs d’atelier font la demande au propriétaire de terrain moyennant un revenu mensuel. Le tableau 2 présente le mode d’acquisition de terrain par les mécaniciens.
L’analyse du tableau 2 montre que 42,86 % des mécaniciens sont installés par la Mairie sur le domaine public de façon provisoire. Sur un effectif de 133 acteurs enquêtés, seulement 02 soit 1,5 % ont acheté leur terrain tandis que 03 mécaniciens, soit 2,26% l’ont obtenu pour des raisons diverses (legs, don, prêt…). 53,38 % des mécaniciens sont en location. Ceux-ci occupent de petits espaces de terrains à proximité des habitations moyennant un loyer mensuel. Le tableau 3 présente les coûts mensuels de la location des sites des ateliers mécaniques dans la ville de Korhogo.
L’analyse du tableau 3 révèle que 71 acteurs mécaniques sont en location, soit 53 garages de motos et 18 garages automobiles. Le coût moyen de location mensuelle des garages motos est de 4900 FCFA et celui des automobiles de 15000 FCFA. Au niveau des garages de motos, 45 mécaniciens louent leurs sites d’activités à des coûts compris entre 2500 FCFA et 5000 FCFA. Certains ont des coûts de location variant entre 5000 FCFA et 7500 FCFA tandis que d’autres sont soumis à des loyers en dessous de 2500 FCFA. Ces coûts de location sont liés à l’emplacement de l’atelier. Les prix de location des ateliers augmentent ou baissent en fonction du peuplement ou du degré de fréquentation de la zone. Quant aux coûts de location des garages automobiles, sur un effectif de 18 mécaniciens, 06 ont des loyers au-delà de 15000 FCFA. Cela est dû au fait que ces garages occupent des espaces un peu plus grand. Parmi, les acteurs enquêtés dans ce secteur, deux (02) mécaniciens ont des loyers compris entre 7500 FCFA et 10000 FCFA, 07 entre 10000 FCFA et 12500 FCFA et 03 entre12500 FCFA et 15000 FCFA.
En somme, il convient de retenir à travers l’analyse de ces tableaux que le mode d’acquisition du site varie d’un acteur à un autre et/ou d’un quartier à un autre comme le soutient C. Guillemin (2008). Le mode d’acquisition des sites se fait auprès de la mairie, par achat, par location, par prêt, legs et par don. Malgré la diversité des modes d’accès aux sites, tous les acteurs payent des taxes journalières (100 FCFA) ou mensuelles (3000 FCFA) à la Mairie.
2.2. Le profil des acteurs des activités mécaniques
2.2.1. Le niveau d’instruction des acteurs
L’effectif des mécaniciens dans la ville de Korhogo ne cesse d’augmenter. Il est passé de moins de 400 en 2012 à plus de 1300 en 2018. L’enquête auprès de 133 acteurs a permis de savoir qu’exercer le métier de mécanicien ou que la qualité du travail qu’il effectue ne relève pas forcément du niveau d’instruction, confirmant G. SABOURIN (2017). Ainsi, le tableau ci-dessous présente-t-il la composition des mécaniciens par niveau d’instruction à Korhogo.
L’analyse du tableau de niveau d’instruction montre clairement que les analphabètes représentent 64,66 % de l’effectif total contre 29,32 % de mécanicien du niveau primaire. Ces proportions rendent compte du faible niveau d’instruction des mécaniciens à Korhogo. Le nombre de ceux ont atteint le secondaire est relativement faible. Ils représentent 3,76 % de l’effectif total contre 2,26 % pour ceux qui ont reçu une éducation coranique. L’analyse du tableau nous montre que plus de la moitié des acteurs des ateliers mécaniques ne savent ni lire ni écrire. Qu’en est-il de la répartition par sexe et par nationalité de ces derniers?
2.2.2. La répartition des mécaniciens par sexe et par nationalité
A Korhogo, l’entretien et la réparation des motos et automobiles font partie des secteurs des activités économiques dominantes dans la ville. Les acteurs intervenants dans ce secteur sont composés du genre masculin, de nationaux et de non nationaux. Le tableau suivant présente le genre et la nationalité des acteurs mécaniques.
L’analyse du tableau montre que 85 % des acteurs sont nationaux contre 13,5% des ressortissants de la Communauté Economique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), elle est de soit 18 acteurs. La part élevée des ivoiriens dans les activités mécaniques montre le grand intérêt qu’accordent les nationaux aux activités de réparation et d’entretien.
2.3. La réparation et d’entretien: un secteur d’activité pourvoyeur d’emploi
Les activités mécaniques d’engins roulants offrent des emplois et des revenus occasionnels aux populations.
2.3.1. Les emplois liés aux activités mécaniques
Les emplois permanents désignent le métier de mécanicien qui se fait de façon permanente et constante. Ce métier emploie des jeunes et participent à la réduction du chômage. Ce sont notamment des jeunes adultes cherchant une expertise dans le domaine de la mécanique avant de s’installer à leur propre compte.
L’analyse du tableau montre que les activités mécaniques sont sources d’emplois. En effet, sur 97 ateliers de réparation et d’entretien de motos, nous enregistrons un effectif de 72 employés, soit 45,57 %. Les 36 garages automobiles emploient 54,43 de l’effectif total. Cela est dû au fait que les garages automobiles demandent une main d’œuvre importante compte tenu de l’ampleur des tâches dans ces ateliers. La mécanique intéresse peu les femmes vu que le travail nécessite beaucoup d’effort physique. D’où le faible taux (5%) des femmes dans ce secteur. Cependant, des jeunes non scolarisés et des déscolarisés se retrouvent dans les garages pour apprendre un métier afin de subvenir à leurs besoins. Le choix de la mécanique est fait soit par les parents soit par le jeune adolescent. Au total, les activités mécaniques sont pourvoyeuses d’emplois. Toutefois, la demande en employé est plus forte dans le secteur de l’automobile que dans celui de la mécanique moto.
2.3.2. Les activités mécaniques des engins roulants génèrent des revenus
Le secteur de la mécanique permet d’avoir des revenus occasionnels. Ces revenus additionnels permettent aux acteurs de subvenir à leurs besoins. En général, il s’agit de la vente des matériaux ferreux (déchets métalliques) et de l’huile de vidange. De plus, les activités mécaniques engendrent la vente de motos, d’automobiles et de leurs accessoires. Aussi, le remplacement d’éléments usés et l’installation d’accessoires sont-ils également des sources de revenus. En somme, dans la ville de Korhogo, les ateliers de mécanique contribuent à réduire le taux de chômage. Le tableau 7 présente les revenus journaliers obtenus par les acteurs mécaniques d’engins roulants dans la ville de Korhogo.
L’analyse du tableau révèle que sur 100 mécaniciens enquêtés, 74, représentant 55,6 % du total ont un revenu en dessous de 10 000 FCFA. 31,5% ont leurs revenus qui oscillent entre 10000 F et 20000 FCFA. 6,8 % de l’effectif des mécaniciens interrogés ont un revenu journalier compris entre 20 000 FCFA et 30 000 FCFA. Ceux dont les revenus varient entre 30 000 FCFA et 40 000 FCFA représentent 3% du total contre 0,8 % dont les revenus sont compris entre 40 000 FCFA et 50 000 d’une part, ou supérieurs à 50 000 FCFA. Le faible revenu de certains acteurs est dû au nombre pléthorique de garages sans oublier la qualité du travail dans l’attractivité et la fidélisation des clients. La situation géographique du garage influence le revenu.
Conclusion
Les activités mécaniques d’engins roulants sont typiquement des garages de motos et d’automobiles à Korhogo. Cette activité offre plusieurs catégories d’emplois aux populations, notamment les emplois permanents et des gains de revenus occasionnels relativement motivants. Une organisation efficiente des secteurs informels à Korhogo est une solution au problème d’emploi. Cependant, force est de reconnaitre que ces ateliers de mécanique produisent une variété de déchets au cours de leur fonctionnement. Comment les déchets mécaniques d’engins roulants produits sont-ils gérés par les mécaniciens ? Et quel pourrait être à long terme l’impact de ces déchets sur l’environnement dans la ville de Korhogo ?
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Auteurs
1Maître-Assistant, Département de Géographie, Université Peleforo Gon Coulibaly, Korhogo, Côte d’Ivoire ; Email : fofanasafrey@yahoo.fr
2Maître-Assistant, Département de Géographie, Université Peleforo Gon Coulibaly, Korhogo, Côte d’Ivoire; Email : konatedjibson@yahoo.fr
3Assistant, Institut de Géographie Tropicale, Université Félix Houphouët-Boigny, Abidjan, Côte d’Ivoire ; Email : abou_c@yahoo.fr