La capacité d’adaptation socio-économique des populations paysannes face aux effets néfastes des variabilités et changements climatiques émane de leur compétence en termes de riposte ou d’anticipation. Toutefois, une meilleure anticipation à ces effets nécessite la connaissance de l’évolution future du climat. Cette étude aborde la question du futur de certaines productions agricoles (riz pluvial, maïs, coton, anacarde) à travers une étude prospective de la pluviométrie dans le département de Korhogo. Elle a pour objectif d’analyser l’évolution future de la pluviométrie, de la saison culturale et de déterminer les taux de satisfaction des besoins hydriques de ces cultures à l’horizon 2060 et 2100. L’analyse porte ainsi sur les données pluviométriques d’observation et les moyennes projetées de 11 modèles issus des scénarii climatiques médians (RCP 4.5) et optimiste (RCP 8.5). Grâce à la méthode des statistiques descriptives s’appuyant sur les tests de PETTITT, de MANN KENDALL et de BRAVAIS PEARSON et à l’analyse des taux de satisfaction hydrique calculés, il ressort que les moyennes pluviométriques éprouveraient une baisse aux différents horizons étudiés. Cette baisse entrainerait une irrégularité du calendrier cultural et compromettra la couverture hydrique des cultures précédemment citées. Face à cette situation, la culture du riz pluvial reste la plus exposée en raison de sa forte exigence en eau.
Mots-clés
The socio-economic capacity of peasant populations to adapt to the adverse effects of climate variability and change stems from their competence in terms of response or anticipation. However, better anticipation of these effects requires knowledge of the future evolution of the climate. This study addresses the question of the future of certain agricultural productions (rainfed rice, maize, cotton, cashew) through a prospective study of rainfall in the department of Korhogo. Its objective is to analyze the future evolution of rainfall, the growing season and to determine the rates of satisfaction of the water needs of these crops by 2060 and 2100. The analysis thus relates to rainfall data from observation and projected means of 11 models from median (RCP 4.5) and optimistic (RCP 8.5) climate scenarios. Thanks to the method of descriptive statistics based on the PETTITT, MANN KENDALL and BRAVAIS PEARSON tests and the analysis of the calculated water satisfaction rates, it appears that the average rainfall would experience a drop at the different horizons studied. This decrease would lead to an irregularity in the cropping calendar and compromise the water cover of the crops mentioned above. Faced with this situation, rainfed rice cultivation remains the most exposed due to its high water requirement.
Introduction
À l’image des pays d’Afrique de l’ouest, la Côte d’Ivoire fait face à un phénomène de variabilité climatique sans précédent à l’échelle historique (BROU et al., 2005, p. 533 et DEKOULA et al., 2018, p. 13201). Cette variabilité spatio-temporelle du climat est un frein à la production agricole (SULTAN et al., 2005, p. 13). Elle pèse sur les personnes, le capital des exploitations et sur leurs résultats, mais également sur les dynamiques collectives, le tout contribuant à accroitre la vulnérabilité des plus pauvres (M. J. DUGUE et al., 2012, p. 2). Ces péjorations climatiques interrogent la capacité d’adaptation des écosystèmes et des sociétés (DOSSIER DE PRESSE, IRD, 2015, p. 6) comme le préconise le Groupe d’Experts intergouvernemental sur Evolution du climat (GIEC) dans son quatrième rapport publié en 2007. Selon R. BALLIET et al. (2016, p. 221) on peut limiter les effets des perturbations climatiques soit en réduisant les émissions de gaz à effet de serre (atténuation), ou soit en s’adaptant (adaptation). Or les insuffisances des connaissances quant à la prévision des précipitations à long terme apparaissent comme un obstacle majeur du secteur agricole à y faire face. Dans cette optique, le GIEC a mis en place une gamme de scénarii. Les scénarios climatiques élaborés d’après B. DOUKPOLO (2014, p. 183) visent à contribuer à la définition des plans et politiques d’adaptation et de mitigation prônés par les pouvoirs publics dans le secteur de l’agriculture afin de réduire les impacts ou d’optimiser les opportunités des changements climatiques futurs.
Pour une région agricole comme celle du département de Korhogo où les systèmes de production reposent sur l’exploitation des ressources naturelles tributaires du climat, il faut privilégier les actions d’anticipation. C’est pourquoi cette étude aborde deux développements futurs de la pluviométrie. Un scénario d’émissions pessimistes qui combine des projections climatiques obtenues à partir des scénarios d’émissions SRES A2 et RCP 8.5 et un scénario d’émissions optimistes qui rassemble des projections climatiques obtenues sur la base des scénarios d’émission SRES B1 et RCP 4.5. Elle vise à analyser l’évolution future de la pluviométrie, de la saison culturale et de déterminer les taux de satisfaction des besoins hydriques des principales cultures à l’horizons 2060 et 2100.