Les stratégies d’adaptation du port d’Abidjan face à la croissance du trafic et aux difficultés d’aménagement sur les sites prévus

Résumé

Le trafic du port d’Abidjan évolue de façon positive. En effet, le port de pêche, construit pour 400 opérateurs en accueillait déjà en 1993, 1 200. Le terminal à conteneurs qui était construit en 1980 pour une capacité de 250 000 conteneurs par an, en recevait plus 531 809 en 2015. De 700 tonnes en 1951, le port a enregistré 21 000 000 tonnes en 2015. Aussi, assiste-t-on à la course vers le gigantisme naval. Les armateurs sont de plus en plus poussés vers l’utilisation des navires plus grands. Pourtant, les projets d’aménagement prévus sur les différents sites n’ont jamais été réalisés pendant que le trafic de la plateforme portuaire d’Abidjan connait une croissance continue. Comment le port s’adapte- t-il à ce trafic de plus en plus croissant ? La présente étude a pour objectif de montrer la stratégie mise en place par le port d’Abidjan pour faire face à cette croissance du trafic. Pour l’acquisition des données, une recherche documentaire a été réalisée aux archives du port d’Abidjan et sur internet. Elle a été sustentée d’interviews semi-structurées avec les autorités et des auxiliaires portuaires.  Une visite guidée a été effectuée au sein du port pour avoir des informations sur la gestion du domaine, la concession des terminaux et les mutations spatiales qui s’opèrent au port d’Abidjan. Cette méthodologie a permis de savoir que les autorités portuaires procèdent par des remblaiements sur la lagune et l’acquisition d’équipements plus performants à travers les concessions.

Abstract

The Abidjan port‘s traffic increase in volume. The fish port build for 400 operators received already in 1993 1200. Moreover, the container terminal which was built for 250 000 containers a year get more van 531 809 containers in 2015. From 700 ton of goods in 1951 the Abidjan port register 21 000 000 ton in 2015. In Addition, the ship owner use more and more big and boat. However, the different planning have never been realized. How does the port face up to the growing of the traffic? The objective of this current study is to show the Abidjan port strategies facing the traffic increasing. To give an answer to this concern, we have some bibliographic researches in the Abidjan port’s archives and on internet. Moreover, we had the discussions with the port authorities and the private (???) and a guided tour in Abidjan harbour to give information about the port estate management, the port terminal concession and the spatial transformation in Abidjan port. This methodology permits to know that the port authorities proceed per embanking on the lagoon and get the more efficient equipment with the concession.

Introduction

Le trafic du port d’Abidjan augmente de façon significative. L’installation portuaire d’Abidjan se distingue des autres ports de la Côte Ouest Africaine (COA) car, construit en lagune et donc limite ces capacités nautiques. Ces concurrents que sont les ports de Cotonou et de Lomé ont par ricochet des tirants d’eau plus importants. Cette insuffisance nautique a fait perdre au port d’Abidjan sa place de hub sur la COA, ce qui se matérialise par la baisse de son trafic passant de plus de 20 millions de tonnes avant la crise de 2010 à 16 millions en 2011. Cette baisse est plus criarde avec un recul surtout pour le trafic de transbordement. Il est passé de la première place à la troisième derrière ses deux rivaux précités. Après les périodes de turbulence (crise sociopolitique et postélectorale) qu’a connue la Côte d’Ivoire, le port d’Abidjan se repositionne avec la reconquête de son trafic transit et surtout la confiance retrouvée par les clients situés dans son avant pays. Ainsi, ce sont plus de 21 000 000 tonnes de marchandises que le port d’Abidjan a enregistré en 2015. Or, l’évolution du trafic s’accompagne de la spécialisation des espaces, du gigantisme des navires et des aménagements portuaires. Pour faire face à l’accroissement du trafic du port d’Abidjan. Il s’est agi de l’extension sur le nouveau site, des travaux sur le site de l’ile Boulay, Locodjro, et le cordon littoral ouest (Figure 1) (Fraternité matin, 2008 ; PAA, 2006).

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Toutefois, tous ces projets d’extension n’ont pas été réalisés, expliquant la saturation de la plateforme portuaire d’Abidjan. Déjà en 1995 l’Association international des villes et port (IVP) signalait que ce port construit pour 400 opérateurs en recevait 1 200. Le PAA a donc opté pour l’optimisation de l’existant qui se trouve être la solution la moins coûteuse et la plus rapide afin de faire basculer la tendance. Puisque l’extension sur le nouveau site nécessite des moyens supplémentaires en dehors de la mise en place des infrastructures elles-mêmes. Il concerne tous les investissements et travaux connexes qui bien que n’étant pas à la charge du concessionnaire constituent des conditions préalables à la réalisation des projets d’extension du port.

Cependant, du fait de son inoccupation et de la poussée urbaine les sites de Yopougon Santé de Locodjro et l’île Boulay réservés pour l’extension du Port font l’objet d’occupation anarchique difficilement maitrisable par les populations. « Le domaine portuaire est devenu un nœud de lutte pour la conquête de l’espace utile avec la ville » (H. J. KABLAN, 2008, page). La presqu’île de Locodjro, une zone de 487 ha comprise entre les villages d’Abobodoumé et Azito a été classée comme réserve portuaire par arrêté le 14 mars 1977.

Cette mise en réserve a été confirmée par décret n° 98-151 du 25 mars 1998 portant délimitation des zones d’extension du Port Autonome d’Abidjan (PAA)

Dans son troisième plan directeur le port d’Abidjan avait prévu sur le site de l’iles boulaie un projet Built  operate and transfert  (BOT) qui s’inscrivait dans sa vision de faire du Port Autonome d’Abidjan, un hub port. Ce projet visait la création d’un terminal à conteneur de trois postes à quai avec un tirant d’eau de 14 mètres où auraient pu être admis simultanément deux navires dont la taille serait comprise entre 240 et 260 mètres.   Un terre-plein de 15 hectares devrait être réalisé pour faciliter les opérations de manutention. Aussi, aussi, le port avait-il en projet la création d’une zone franche industrielle d’une superficie de 160 hectares en fonction des besoins des opérateurs ; l’installation d’infrastructures de télécommunications avec une station terrestre internationale et un nœud de téléphonie pour permettre des échanges rapides d’information avec les autres ports du monde. Trois portiques de grande portée allaient être installés pour faciliter l’opération de manutention. Ce projet devrait comporter la construction de 12 postes de marchandises diverses à -12,5 m, un terminal sucrier, un poste céréalier et un port de pêche. Il prévoyait aussi une zone industrielle de 180 hectares derrière une zone d’entrepôt hors douane, avec extension possible vers Azito. Cependant, ce projet qui devait être exécuté depuis 1980 n’a pu voir le jour. Le site est occupé par quatre quartiers dont le montant global des indemnisations en cas de déguerpissement a été estimé à 16.542.357.418 FCFA par le cabinet d’expertise KADJANE (PAA, 2000, page). Jusqu’ à ce jour, aucune indemnisation n’a été faite et la population continue de croître à cause de l’urbanisation galopante.

Il en est de même pour le site de l’île Boulay prévu pour l’extension qui voit sa population grandir. En 2003, le site comptait 7 villages et 3 campements ; la population était estimée à 7380 personnes sur une superficie de 679 ha avec 83% de nationaux et 17% d’étrangers venant de la sous-région (BNETD, 2003). Aujourd’hui, l’île est occupée par 13 villages de pêcheurs et les populations qui y vivent sont estimées à 11 000 habitants. Comment le port d’Abidjan s’adapte-t-il au trafic de plus en plus croissant ?

La présente étude a pour objectif de montrer les stratégies mises en place par le port d’Abidjan pour faire face à la croissance du trafic.

1-Méthodologie

La recherche de l’information pour répondre à cette préoccupation passe nécessairement par une revue de la littérature et une enquête de terrain. Pour l’acquisition des données, une recherche documentaire a été réalisée aux archives du port d’Abidjan et sur internet. Elle a surtout concerné les documents relatifs aux différents projets. Elle a été sustentée d’interviews semis-structurés avec les autorités portuaires (directeur du domaine et directeur des infrastructures) et des auxiliaires portuaires. Ainsi avec le directeur du domaine nous avons discuté pour avoir des informations relatives à la gestion des différents espaces du domaine portuaire. Quant au directeur des infrastructures, il nous a entretenu sur les questions relatives aux travails en cours et à venir les travaux et des auxiliaires portuaires, la concession des terminaux et les mutations spatiales qui s’opèrent au port d’Abidjan. Aussi, avons-nous participé à des conférences animées par les autorités portuaires. Par ailleurs, la visite guidée que nous avons faite entre septembre 2016 et décembre 2019 au port d’Abidjan a été nécessaire pour observer la réalisation d’ouvrage sur le site actuel. Avant cela, nous avons fait un stage au port d’Abidjan en 2008 pour la soutenance de notre maitrise. Ce stage nous a permis d’analyser l’évolution des travaux.

3-Résultats

Dans la perspective du retour du port d’Abidjan dans le concert des grands ports du monde, des projets ambitieux à court et moyen terme ont été initiés pour réhabiliter les infrastructures existantes et en développer de nouvelles non seulement pour répondre efficacement aux besoins sans cesse croissants du secteur et mais aussi et surtout pour faire face à la concurrence sous régionale. Les autorités portuaires ont opté pour une optimisation de l’existant en lieu et place de l’extension sur les nouveaux sites. Elles ont donc conçu sept grands projets dont quatre sont en court de réalisation tandis que les trois autres sont en attentes.

1-1-Les projets en cours de réalisation pour l’augmentation de la capacité d’accueil du port d’Abidjan

Quatre projets sont en cours de réalisation pour l’agrandissement de la capacité d’accueil du port d’Abidjan. Il s’agit du deuxième terminal à conteneur, du couple d’élargissement du canal de Vridi et l’approfondissement du chenal d’accès, de la construction du nouveau port de pêche et du remblaiement de la baie de Biétry.

1-1-1-La construction du deuxième terminal à conteneurs (TC 2) sur le site existant

Dans l’optique d’accroître le trafic conteneurisé et particulièrement celui des conteneurs en transbordement, le Port Autonome Abidjan (PAA) a entrepris les travaux de la construction du deuxième terminal à conteneur depuis octobre 2015 (photo 1).

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En effet, la signature de la convention de concession pour la réalisation et la construction de ce deuxième terminal à conteneurs du port d’Abidjan a eu lieu le 19 décembre 2013 entre l’État de Côte d’Ivoire et le consortium APM/Terminal/Bolloré Africa Logistics/Bouygues TP.  Pour la construction, le Port Autonome d’Abidjan a fait un emprunt auprès d’une banque chinoise et a confié le marché à l’entreprise China Harbour Engineering Company Ltd (CHEC). À la fin des travaux, le port d’Abidjan aura un linéaire de quai d’une longueur totale d’accostage de 1250 m avec 16 m de profondeur.

Ce deuxième terminal à conteneur s’étendra sur une superficie de 37,5 ha et pourra traiter 3 000 000 EVP par an contre seulement 1 200 000 en 2015. Dans cet espace, il est prévu, la construction d’un terminal RORO dans l’optique d’accroître le trafic roulier et de disposer d’un véritable terminal moderne. Ce projet consiste à réaliser un quai de 250 m linéaires avec 13,5 m de tirant d’eau avec une superficie de 10 ha.

1-1-2-La réhabilitation et la modernisation du port de pêche

Le port a entrepris des travaux de remblaiement au niveau du port de pêche. L’opération, consiste en la réhabilitation des installations déjà existantes d’un part et d’autre part en l’augmentation de l’offre des quais. Le port a donc entrepris la création de nouveaux terre-pleins. Ainsi, à l’issue d’un appel d’offre international lancée en 2013, ce marché a été attribué au groupement SOGEA / SATOM-EMCC-DREDGING et les travaux sont en cours depuis 2014. La première phase du projet a consisté en la construction d’un môle de huit hectares dont trois hectares de quais déjà en exploitation (photos 2 et 3) et cinq destinés aux entreprises évoluant dans le domaine de la pêche. La construction de ce môle permet au port d’Abidjan d’accueillir des navires ayant des tirants d’eau allant jusqu’à 10 m et par ricochet d’accroître le trafic de pêche.

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Dans la seconde phase, il s’agira de remblayer la darse existante afin d’obtenir un nouvel espace de 19 ha destinés à l’implantation des industries de pèche.

1-1-3-La création de terrain industriel dans la baie de Vridi

Le port d’Abidjan a entrepris la création de terrains industriels dans la baie lagunaire de Vridi. En effet, il s’agit pour le port Autonome d’Abidjan de remblayer 200 ha de cette baie pour permettre l’installation des opérateurs privés dont les demandes d’installation datent de deux ans. La phase pilote a commencé en octobre 2015 et s’est achevé en 2016 avec la réalisation de 35 hectares de terrain. Le projet de remblaiement de la Baie de Biétry sera accompagné de la construction d’un pont (Pont de Biétry) qui reliera la zone remblayée au pont De Gaulle en passant par le carrefour SOLIBRA et d’un espace dédié à la plaisance. Ce pont permettra de désengorger la zone portuaire et péri-portuaire. Ainsi, les camions en provenance et à destination de cette zone et même au-delà seront affranchis des encombrements des voies de communication au niveau du boulevard de Vridi.

Les projets entrepris sur le site actuel du port n’auront un sens que s’ils s’accompagnent des deux projets majeurs que sont L’élargissement et l’approfondissement de la passe du canal, l’approfondissement des chenaux d’accès

1-1-4-L’élargissement de la passe et l’approfondissement du chenal d’accès : des travaux indispensables

Les travaux d’élargissement de l’entrée du canal de Vridi ont été entrepris en 2014. En effet, la course vers le gigantisme naval est un phénomène qui fait de plus en plus figure dans le domaine maritime. La taille des navires, à l’avènement du trafic conteneurisé, a commencé à devenir de plus en plus grande. Ainsi, la taille moyenne des porte-conteneurs est passée de 2 000 EVP[1] calant 11,5 m et long de 243 m dans les années 1980, à 7 000 EVP long de 300 m et calant 14,5 m, dans les années 1996. Depuis 2015, MSC possède un porte-conteneur de 19 224 calant 16 mètres. Déjà en 2008, Damien M.M. disait que des études pour la construction de navire calant entre 17,5 et 18 m étaient en cours en cours d’étude.

Le rêve du directeur général de faire d’Abidjan un Hub port impose de prendre en compte les besoins des armateurs, car ce sont ses eux qui convoient leurs navires dans une zone donnée. Pourtant, la configuration de l’entrée du canal de Vridi posait problème. Sa largeur de 200 m et sa profondeur de 13,50 m ne permettaient pas au gros navire d’y passer à toutes les conditions de marrée et de courant. Outre cela, les deux rives du canal comportant une portion e terre « bec » (photo 4) qui impose au navire de faire des détours, demeuraient un souci majeur pour ces grands navires.

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Ce projet d’élargissement a débuté (photo 5) en octobre 2015, avec comme maitre d’ouvrage l’entreprise chinoise CHEC. Ces travaux sont couplés avec les travaux d’approfondissement des chenaux pour accueillir les gros navires qui viendront au Port d’Abidjan après l’élargissement.

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Selon le directeur des infrastructures, l’élimination du « bec » du canal permet au Port d’Abidjan d’accueillir en tout temps des navires porte-conteneurs et conventionnels de plus de 300 m de long et de 16 m de tirant d’eau dans des meilleures conditions de sécurité. Pour ce qui concerne le chenal d’accès en fait, sa profondeur actuelle aux quais Sud et au Terminal à Conteneurs de Vridi est d’environ 13 m. La profondeur du chenal d’accès aux autres quais varie entre 10 et 11 m. Cette situation conditionne souvent le chargement de navires. Il impose à certains navires entrant au port d’alléger leur charge aux quais Sud avant de venir aux quais Nord ou au quai Ouest. Le dragage des hauts fonds des chenaux d’accès au quai permettra d’avoir des profondeurs d’au moins 14,5 m afin d’être conforme à l’esprit du projet de l’élargissement du canal de Vridi. Pour l’élargissement et l’approfondissement de la passe d’entrée du canal de Vridi, l’entreprise CHEC Bénéficie d’un financement d’EXIMBANK. évaluée à 25 milliards de Francs CFA

2-Les travaux en projet

En dehors des projets en cours d’exécution, l’autorité portuaire en a quatre autres à réaliser. Il s’agit des terminaux céréalier et minéralier et du parking de stationnement.

2.1 La construction des terminaux céréaliers et minéraliers  

Le PAA, dans la dynamique de sa politique de spécialisation de ses quais, entend mettre en place un nouveau terminal céréalier au niveau du quai Ouest et un terminal minéralier. En effet, selon le directeur des infrastructures, le PAA procédera à un remblaiement d’une partie de la lagune afin d’obtenir environ 10 hectares de terrain et 400 m de linéaire de quai destinés aux céréales. Le projet comporte aussi la construction de magasins cales pour le stockage des marchandises. Concernant le terminal minéralier, il s’agira aussi du remblaiement de 23 ha de la lagune. Ce terminal aura 550 m de mur de quai. Les quais de ces deux terminaux auront des tirants d’eau de 13,5 pour permettre d’accueillir des navires plus grands.

2.2. La construction d’un parking pour camions hors du port

Le PAA prévoit la construction d’un parking pour camions au KM 27 sur l’autoroute du nord. En effet, selon le directeur de la planification et du développement, la plateforme de stationnement située dans la zone de tri postale de Vridi ne peut contenir que trois cents véhicules poids lourds simultanément. Elle est donc incapable de contenir tous les camions afférant au port pour la desserte terrestre. Le second parc localisé dans la zone de Vridi est destiné seulement aux camions citernes. Par ailleurs, l’espace contenant les 30 hectares acquis par le port pour servir de plateforme de stationnement, d’empotage et de dépotage a été déclassé par l’État de Côte d’Ivoire, La plateforme de stationnement de Yopougon dont il est question dans la note circulation du 1er avril 2015, n’a pas été construite Aussi, le comptage des camions révèle que par jour ce sont 1 500 camions poids lourd qui sont stationnés sur l’espace portuaire. C’est pourquoi le PAA à projeté de construire un parking au niveau du KM 27 sur l’autoroute du Nord. Sur cet espace, il est prévu un espace de restauration, une mosquée, une église et toutes les commodités en vue de décongestionner la zone portuaire. 

Outre cela, il est prévu la construction une station de traitement de déchets liquides afin d’offrir aux navires et industries, la possibilité de se délester de leurs résidus liquides dans de meilleurs conditions de sécurité pour garantir la protection de l’environnement marin et lagunaire.

En somme, le port d’Abidjan a projeté des travaux sur le site existant pour répondre aux besoins actuels et ceux du futur proche pour répondre aux exigences de l’a croissance du trafic et la concurrence actuelle sur la côte ouest africaine. Sur les sept projets prévus quatre sont en cour d’exécution tandis que les trois autres sont en attente (Figure 2).

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3-Discussion

L’étude a montré que pour faire face au trafic de plus croissant, les autorités portuaires ont opté pour l’optimisation de l’existant en procédant par des remblaiements par endroit de la lagune Ebrié contrairement à l’extension attendue sur les réserves portuaires depuis 2004. Consolider l’existant avant toute extension, tel est le credo actuel des autorités portuaires. Ainsi, à partir de 2011 sept projets majeurs ont été prévus sur le site actuel du port. Parmi ces projets, quatre dont le terminal a conteneur, le port de pêche, le remblaiement de la baie de Biétry l’élargissement de la passe d’entré et l’augmentation des tirants d’eau du chenal sont en cours d’exécution.

L’optimisation de l’existant avant l’extension sur les réserves portuaires répond plutôt à un souci de concurrence. En effet, s’il est vrai que les ports doivent s’adapter aux différentes mutations qui s’opèrent dans le domaine maritime, ils doivent surtout s’équiper pour faire face à la concurrence qui se fait au niveau des rangés portuaire. En fait, l’autre fait marquant de l’évolution du transport maritime est l’essor du transbordement. Au niveau mondial, il concerne plus d’un tiers des conteneurs manutentionnés, Damien (2008, page). Aussi En dehors donc de l’indemnisation des populations estimée à plus 16 milliards, la mise en place des infrastructures nécessite la construction d’un ouvrage de franchise reliant l’ile Boulay à Azito. L’analyse de ces projets montre qu’ils s’inscrivent dans la nouvelle politique du PAA qui est celle de la spécialisation des quais en vue de la rationalisation de la gestion des espaces dans le port et surtout l’amélioration des performances opérationnelles.

En ce qui concerne les aménagements au niveau du port de pêche, Il y a de cela environ 50 ans que la première tranche du port de pêche a été mise en place, après le quai provisoire et le petit hangar de crié, créé en 1955. Ces infrastructures du port étaient dans un état de vétusté avancé. Et cela nécessitait de gros moyen pour l’entretien. Il fallait donc moderniser le port de pêche existant et augmenter l’offre des quais.

En dehors des aménagements sur le site existant, le port prévoit la construction d’un parking pour camions au PK 27 sur l’autoroute du nord afin de réduire l’encombrement sur l’espace portuaire. Vu la distance qui sépare cet espace du port (plus de 30Km), nous pensons que ce projet n’est pas viable a court terme. La distance géographique entre cet espace et le port ne serait-elle pas une contrainte majeure à l’utilisation de cette plate-forme de stationnement ? en effet, une plateforme similaire, plateforme de SOGEGAR aménagée par un opérateur privé pour désengorger la gare routière d’Adjamé été cédée à l’Office Ivoirien des Chargeurs (OIC) pour le stationnement des véhicules du port ? Cependant, elle n’a pas été utilisée et les camions continuent de stationner le long des trottoirs ou sur les espaces publics à proximité du port. Selon Kablan et all 2015, La non-utilisation de cette plateforme résulte, de la distance géographique (à plus de 30 Km du port) mais aussi et surtout de la distance temps lié à l’étroitesse de de voies de communication doublée des embouteillages qui restent à leur désavantage.

Pour nous, l’utilisation de la baie de Biétry pour le stationnement des camions serait la solution idoine pour le parcage des camions.

L’optimisation de l’existant reste la meilleure solution. Cependant, il ne faut pas perdre de vu le fait que les réserves portuaires sont toujours soumises à une urbanisation galopante. Le dédommagement estimé à 16 milliards au début des années 2000 connaitra certainement une hausse. Les difficultés d’aménagement des infrastructures portuaires sont des faits ubiquistes. Subra (2007, page) a révélé que « depuis les années 1980, l’aménagement est entré dans une nouvelle ère « géopolitique » émaillée de tensions, d’oppositions et d’affrontements ». Quant à Jobert (1998) cité par Lavaud-Letilleul (2012,) il a indiqué que ces « conflits de proximité », qualifiés de locaux ou de territoriaux, ne sont certes pas l’apanage des sociétés contemporaines. Il révèle que depuis les années 1970, les réactions d’opposition à l’implantation d’équipements collectifs pouvant générer des nuisances pour le voisinage se sont multipliées, diversifiées et structurées.

Pour ce qui concerne les réserves portuaires d’Abidjan, en plus de l’optimisation de l’existant qui est considéré comme la solution dans le contexte actuel, l’État devrait prendre des mesures pour minimiser les frais d’indemnisation dans l’avenir 

Conclusion

Le sujet « les stratégies d’adaptation du port d’Abidjan face à la croissance du trafic et aux difficultés d’aménagement sur les sites prévus » a été traité dans l’optique de montrer la façon dont le port d’Abidjan s’accommode aux différentes mutations que connait le secteur des transports maritimes. La démarche méthodologique a permis de montrer que, depuis 2011, les autorités portuaires d’Abidjan ont choisi d’optimiser le site actuel en lieu et place de l’extension qui avait été prévue sur les réserves portuaires. Ainsi, elles ont choisi de remblayer une partie de la lagune afin d’augmenter le nombre de postes à quai et de créer des espaces pour l’installation des industries. Ce choix réside dans le fait que l’extension sur les réserves portuaires devait nécessiter, en dehors des coûts liés à l’installation des infrastructures portuaires, des coûts supplémentaires pour le dédommagement et la relocalisation des populations qui habitent ces réserves et pour la construction de l’ouvrage de franchise sur la lagune. Aussi, ont-elles entrepris des travaux d’élargissement de la passe d’entrée et de dragage des fonds pour faciliter l’accueil des navires plus grands. En tout, sur les sept projets qui ont été prévus sur le site actuel, trois ont débuté en 2014 et la fin de tous les travaux est prévue pour fin 2019. Cependant, l’idée de la création de la plateforme de PK 27 devrait être revue pour éviter la construction d’un site que ne sera pas utile.

Références bibliographiques

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DAMIEN. Marie . M., 2008, Conteneurisation et dynamique portuaire, in GUILLAUME J. (dir) les transports maritimes et la mondialisation, l’ Harmattan, Paris, 279 p (pp 105-134)

Fraternité matin, 2008, Les chantiers de l’avenir, éd SNPCI, Abidjan 66 p

GUILLAUME. Jacques ., 2008, Les transports maritimes dans la mondialisation, les transports maritimes et la mondialisation, l’Harmattan, Paris, pp 7-23

KABLAN N’guessan . Hassy. Joseph. ; KABRAN Gnankon . Estelle. Giselle  et Aké Aké . B.rice  Patrick., 2016« activités portuaires et perturbations du trafic urbain ; cas de l’agglomération d’Abidjan » in second numéro regardsuds 2016   Aménagement et Urbanisme www.regardsuds.org

LAVAUD-LETILLEUF. Valérie ., 2012, L’aménagement portuaire en débat. Points de vue d’acteurs sur les grands projets d’équipement portuaire du littoral français, 2012 en ligne sur http://norois.revues.org/4320 ;DOI : 10.4000/norois.4320, consulté le 6 juillet 2016

PAA, 1983, Extension du PAA, PAA, Abidjan, 27 p

PAA, 2000, Port Autonome d’Abidjan 50ème            anniversaire, PAA, Abidjan, 260 p

PAA, 2006, Statistique 2006 / Prospective 2007, PAA, Abidjan, 24 p

PAA, 2007, Découvrir le port d’Abidjan : port        leader de la côte Atlantique, PAA, Abidjan, 34 p

SUBRA P., 2007, Géopolitique de l’aménagement du territoire, Armand Colin, collection « Perspectives Géopolitiques », Paris, 327 p.

 

[1] Équivalent vingt pieds, TEU en anglais

 

 

 

Auteur

1Assistant, Université Félix Houphouët-Boigny d’Abidjan (Côte d’Ivoire), chercheure associée au Centre Suisse de Recherche Scientifique en Côte d’Ivoire, estellekabran@gmail.com

 

Catégorie de publications

Date de parution
31 déc 2020