En Côte d’Ivoire, les aires protégées constituent des réserves importantes de biodiversités. Ces sites subissent des pressions qui modifient le paysage. Il est fondamental pour la préservation de ces espaces de comprendre l’impact de la saturation foncière sur ceux-ci. La présente étude vise à analyser les incidences des pressions foncières sur la dynamique de la couverture végétale du Parc National du Mont Peko (PNMP). La méthodologie adoptée s’appuie sur une analyse multi-dates de l’occupation du sol à partir de l’exploitation des images Landsat TM (1990), ETM+ (2000 et 2011) et OLI-Tirs (2020). Cette approche est complétée par des enquêtes de terrains et l’administration d’un questionnaire à une population d’enquête estimée à 180 personnes sur la base de la méthode par itinéraire. Les résultats indiquent que le couvert forestier a connu une importante dynamique régressive entre 2000 et 2020. Pendant cette période, le PNMP a enregistré le plus important taux de rétrécissement de son couvert forestier, soit 48%. Cette importante superficie perdue a été reconvertie à 90% en espaces cultures/jachères. Cette déforestation est essentiellement due à l’exacerbation des pressions foncières. Les facilités d’acquisition du capital foncier et le rapide accroissement spatial des superficies des terres emblavées au profit de la cacao-culture sont les indicateurs de cette charge foncière.
In Ivory Coast, protected areas constitute important biodiversity reserves. These sites are subject to pressures that modify the landscape. It is fundamental for understanding these spaces to understand the impact of land saturation on them. This study aims to analyze the impacts of land pressure on the dynamics of vegetation cover in Mount Peko National Park (PNMP). The methodology adopted is based on a multi-date analysis of land use based on the use of Landsat TM (1990), ETM+ (2000 and 2011) and OLI-Tirs (2020) images. This approach is supplemented by field surveys and the administration of a questionnaire to a survey population estimated at 180 people based on the route method. The results indicate that the forest cover experienced significant regressive dynamics between 2000 and 2020. During this period, the PNMP recorded the highest rate of shrinkage of its forest cover, i.e. 48%. This significant lost area has been reconverted 90% into crop/fallow areas. This deforestation is essentially due to the exacerbation of land pressures. The ease of acquiring land capital and the rapid spatial increase in the areas of land sown for cocoa cultivation are indicators of this land burden.
Introduction
La gestion durable des aires protégées constitue une problématique majeure pour les pouvoirs publics en Côte d’Ivoire. En effet, en 50 ans le pays a perdu près de 90% de sa couverture forestière suite à l’extension incontrôlée des surfaces agricoles (commodafrica.com, consulté le 13/08/2023 à 19h54mn). Un réseau de huit (8) parcs nationaux sera créé sur le territoire national afin d’assurer la protection des massifs forestiers et leurs biodiversités. Ainsi, le Parc National du Mont Peko (PNMP) verra le jour le 9 Février 1968 dans l’ouest forestier ivoirien.
Crée par décret n°68-79 du 9 février 1968, le Parc National du Mont Péko (PNMP) est une masse forestière située dans la partie Ouest de la Côte d’Ivoire, entre 6°53' et 7°08' de latitude Nord et entre 7°11' et 7°21' de longitude Ouest (figure 1).
Figure 1 : Carte de localisation du Parc National du Mont Péko
Source : SODEFOR, 2016 Réalisation : BLÉ Carlos, Novembre 2021
Il est à cheval sur les départements de Bangolo au Nord et de Duékoué au Sud dans la région du Guémon (O. SIDIBÉ et al, 2020, p.344). Sa superficie est estimée à 34 000 hectares. Celle-ci s’avère inférieur sur le terrain, en raison de la délimitation erronée du parc en 1974 (O. SIDIBÉ et al, 2020, p. 344). Son administration est assurée par la Société de Développement des Forêts (SODEFOR) sous tutelle du ministère des Eaux et Forêts.
Les potentialités agricoles et la disponibilité foncière ont suscité un vaste mouvement de conquête de son espace par des populations autochtones et des migrants agricoles d’origine allogène et allochtone. Face à l’extension des terres agricoles, l’absence des structures de gestion des forêts ivoiriennes due à la crise militaro-politique de 2002 à 2011 et à l’amenuisement des surfaces culturales qui s’ensuit, l’infiltration du parc devint une alternative pour les populations paysannes. De plus, les cultures vivrières moins consommatrices d’espace et pratiquées aux abords et à l’intérieur du parc sont remplacées progressivement par de vastes plantations de café et de cacao. La pression des activités agricoles sur le foncier provoque une dégradation de la couverture végétale du parc. Un état des lieux de la situation actuelle de la couverture forestière du parc national du mont péko et de son évolution s’imposent avec acuité dans une perspective de gestion intégrée et participative. Ainsi, l’objectif de cette recherche est de faire l’état des lieux des effets de l’anthropisation sur la dynamique de la couverture forestière au sein du parc national du mont Péko.
Le climat de la zone d’étude est de type tropical humide (secteur montagnard) à deux saisons, dont la pluvieuse s’étend de Mars à Octobre et la sèche de Novembre à Février. La pluviométrie moyenne annuelle varie entre 1600 mm et 2 000 mm La température moyenne annuelle oscille autour de 25°C par an. La végétation est constituée de forêt humide semi-décidue, de forêt dégradée et de jachères résultant des activités humaines (O. SIDIBÉ et al, 2020, p.345). La population riveraine du Parc National du Mont Péko est estimée à 128 889 habitants, selon le Recensement Général de la Population et de l’Habitat de l’année 2014 (INS, 2014). Elle est composée d’autochtones Guéré, d’allochtones Baoulé, Malinké et d’allogènes Maliens et Burkinabé. Les autochtones Guéré, représentant la forte proportion de population dans cette zone, regroupe une vingtaine de villages appartenant aux trois (3) grands cantons que sont les cantons Zagna, Tahouaké et Zagné. Les villages d’allochtones et d’allogènes ont vu le jour suite aux mouvements migratoires opérés vers la zone. L’activité principale des populations de cette zone est l’agriculture. En dehors des activités agricoles, l’exploitation artisanale et industrielle du bois, la fabrication du charbon de bois, le transport, l’élevage et le commerce sont quelques activités auxquelles s’adonnent les populations de cette zone.